AMG AMD AME CMU

En un siècle, l’Assistance médicale à destination des plus pauvres est devenue une Aide médicale à destination des seuls sans-papier.
L’Aide médicale d’Etat (AME), pendant un temps « départementale », est un filet de sécurité pour une partie des personnes les plus démunies, leur permettant d’accéder aux soins les plus élémentaires. Mais son existence même, très ciblée, pose la question de la marginalisation de ses bénéficiaires.

C’est la loi du 15 juillet 1893 qui crée l’Assistance médicale gratuite (AMG), permettant aux malades les plus pauvres (malades, vieillards et infirmes privés de ressources) de bénéficier d’un accès gratuit aux soins de santé.
Outre une loi du 14 juillet 1913 relative à l’assistance des familles nombreuses, un autre texte fondateur a été le décret 53-1186 du 29 novembre 1953 relatif à la réforme des lois d’assistance dont l’article 1er énonçait : « Toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales d’attribution, des formes de l’aide sociale […] ». Ce texte visait à remettre en ordre un système d’assistance devenu confus, dualiste entre Sécurité sociale et assistance, et à le moderniser pour éviter les disparités entre les départements qui en avaient la charge. Pour réformer l’assistance, l’aide médicale est d’abord remise à la charge de l’Etat.
Il faut souligner que le texte initiait une réflexion autour d’un « droit à l’aide sociale », sorte d’aide qui apparaît comme un devoir de la collectivité à l’égard des plus pauvres. Dès lors, l’aide sociale a la particularité d’être attribuée sans contribution préalable du bénéficiaire.

C’est ensuite une des « lois de décentralisation », la loi 83-663 du 22 juillet 1983 - complétant la loi 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat - qui a fait peser à nouveau sur les départements la charge des prestations d’aide sociale parmi lesquelles l’« aide médicale » (aide médicale aux malades mentaux, prise en charge des frais médicaux et hospitaliers…). Ainsi, l’Aide médicale départementale (AMD) est instaurée.
Cependant, deux distinctions existent. La première tient au fait que l’Etat garde la charge des cotisations d’assurance personnelle et que le département supporte la charge de l’aide médicale pour « soins de ville », de l’aide médicale « hospitalière » et de l’aide médicale des malades mentaux. La seconde distinction tient au fait que, dans la catégorie des aides médicales supportées par le département, si elles bénéficiaient à une personne domiciliée en France alors elles restaient supportées par le département, sinon leur charge échouait à l’Etat.

La loi 92-722 du 29 juillet 1992 - portant adaptation de la loi 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d’insertion et relative à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale et professionnelle - a assoupli les conditions d’accès à l’AMD. Ainsi, le législateur a offert aux personnes non couvertes par l’assurance maladie de base de prendre en charge les cotisations d’assurance personnelle et, pour les personnes déjà affiliées à un régime d’assurance maladie, de supporter la part des dépenses de santé non prise en compte par la Sécurité sociale. Cette loi a permis également d’accorder automatiquement l’AMD aux bénéficiaires du RMI. Enfin, la demande d’AMD pouvait être faite, au choix du demandeur, auprès du centre communal ou intercommunal d’action sociale du lieu de résidence du demandeur.

Jusqu’en 1993, il n’existait aucune condition de régularité de séjour tant pour l’assurance maladie que pour l’AMD qui, venant compléter ou remplacer l’assurance maladie, était réservée aux plus pauvres.
La loi 93-1027 du 24 août 1993 relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France, dite « Loi Pasqua », a bouleversé cette organisation en introduisant une condition de régularité de séjour pour bénéficier de l’assurance maladie. En conséquence cette loi a supprimé le droit à la protection sociale pour les sans-papier qui, comme les plus pauvres, se tournaient vers l’AMD.
Par la suite, la loi 99-641 du 27 juillet 1999 relative à la Couverture maladie universelle (CMU) devait à l’origine faire disparaître l’AMD et unifier tous les résidents de France dans une protection maladie « universelle », égale pour tous. Mais le maintien de l’exigence de régularité de séjour pour l’assurance maladie a conduit au maintien d’un dispositif d’aide médicale spécifique pour les étrangers en séjour irrégulier. Ce dispositif spécifique est l’Aide médicale d’Etat (AME).

Pour résumer le dispositif existant depuis 1999, un système dualiste est maintenu : la CMU théoriquement « universelle » d’un côté, l’AME pour les sans-papier d’un autre côté.

L’AME est un dispositif exclusivement destiné aux étrangers en situation irrégulière. Pour en bénéficier, il faut remplir des conditions de ressources, identiques aux conditions pour bénéficier de la CMU, et résider en France (sans condition de durée depuis la loi 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002). Une fois acquise, l’AME ouvre droit à un « panier de soins » pris en charge, sensiblement inférieur au panier prévu dans le cadre de la CMU. Ainsi, par période d’un an, l’allocataire peut bénéficier de certains soins gratuitement.

POUR EN SAVOIR PLUS :
- Lire l’étude de Marie Ruault, « L’aide médicale départementale : bilan au 31 décembre 1998 », publiée en avril 2000 par la DREES :

DREES (Avril 2000) AMD Bilan décembre 1998 (PDF - 446.8 ko)
- Lire l’étude de Bénédicte Boisguérin, Christine Bonnardel, Claude Gissot et Marie Ruault, intitulée « Aide médicale départementale : bilan 1996-1999 », et publiée par la DREES en juillet 2001 :

DREES (Juillet 2001) AMD Bilan 1996-1999 (PDF - 457.1 ko)
- Lire le rapport de Blanche Guillemot et François Mercereau, « Rapport sur l’évolution de l’Aide médicale d’Etat », publié en février 2003 par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) :

Rapport Guillemot & Mercereau 2003 Evolution AME (PDF - 604.8 ko)
- Lire l’étude de Bénédicte Boisguérin et Brigitte Haury, intitulée « Les bénéficiaires de l’AME en contact avec le système de soins », publiée en juillet 2008 par la DREES :

DREES 2008 Bénéficiaires AME (PDF - 194.6 ko)
- Consulter le site du Fonds CMU.

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